Made in China

Publié le par parisvladiv

 

Mon vélo commence à avoir de sérieux problèmes... Même avec notre nouvelle huile, il ne roule pas mieux. Je ne peux plus utiliser toutes mes vitesses. Dès que j'appuie un peu plus fort sur les pédales, ça fait un bruit d'enfer. Verdict: les plateaux sont trop usés et la chaîne n'accroche plus dessus. Ça ne va pas en s'améliorant car le paysage est vallonné et le nombre de vitesses et de plateaux utilisables se réduit de plus en plus.

 

Peu après Hexigten Qi, nous avons pris une route qui n'était pas encore ouverte à la circulation. 20 km de bonheur. Bordée d'énormes plants de cannabis, je me suis demandée en rigolant si ce n'était pas un coin de narco-trafiquants. Mais pas âme qui vive. On est un peu perdu dans toutes ces routes qui ne sont pas sur notre carte surtout que celle qu'on voulait rejoindre n'existe pas. Nous avons pris en photo la carte d'un routier, beaucoup plus précise que la nôtre et avec les bons numéros de route. Les noms de certaines villes sont indiqués en anglais et en chinois, ce sera plus facile pour demander notre chemin et lire les panneaux.

 

Mais à présent nous sommes condamnés à rester pour un moment sur cette grande route, la G303. Pas très palpitant. Elle traverse peu de villages, évite les villes et le paysage est monotone. Une colline après l'autre. Du vent. Jamais dans le dos. On a changé ma chaîne. Je note une légère amélioration mais il faut vraiment que je trouve un magasin de vélo à la prochaine ville. Tous les jours, nous croisons des péages sur cette route. De grands bâtiments où logent le personnel les côtoient, souvent isolés. Aujourd'hui je suis arrivée toute dégoulinante de sueur pour demander de l'eau. L'un des types m'a emmené dans son bureau et a ouvert une armoire. Il m'a donné un petit cabas avec une serviette de toilette toute neuve, un gel douche et du shampoing. J'ai filé direct sous la douche! Une fois sortie, il m'a installée devant son ordinateur et grâce au traducteur sur internet, il a pu avoir toutes les réponses à ses questions. D'où je viens, où je vais, pourquoi ce voyage,...? Son collègue est revenu avec un gros paquet de gants blancs en coton qu'il voulait m'offrir. Ils les utilisent pour leur service car ils s'occupent du péage mais également de la police du trafic. J'en ai pris juste une paire pour leur faire plaisir. C'était une halte bien agréable en fin de journée...

 

La route a changé de numéro mais elle est toujours aussi peu intéressante. On s'est arrêté en ville pour changer mon matériel de vélo. Une jeune femme nous a d'abord conduit dans un petit magasin de cycle, qui nous en a indiqué un second qui n'avait toujours pas les pièces adéquates. Un attroupement s'est formé. Après réflexion, on nous a indiqué une boutique dans la vieille ville. Notre bienfaitrice a appelé son père qui est venu avec son pick-up. Il nous ont déposé devant le magasin avant de retourner à leur occupation. Peu de temps après deux professeurs d'anglais sont passées par là. Elles nous ont aidés à expliquer le problème au réparateur. Je ne savais pas trop s'il avait les pièces et si ça valait le coup d'attendre car il s'affairait sur d'autres bicyclettes mais finalement il a trouvé le matériel en démontant un des vélos en vitrine. Les vendeurs ont installé une tente sur le trottoir pour nous protéger du soleil! Vu l'étroitesse des magasins et la largesse des trottoirs, ils deviennent forcément le prolongement des boutiques. Nous sommes vite devenus l'attraction du quartier. Et ce lieu était en fait une association de cyclisme. Le vélo réparé, le chef des pompiers, de passage dans le coin, nous a tous emmené déjeuner dans un restaurant près de la caserne. Sur le plateau tournant de la table, c'est un défilé de plats colorés plus succulents les uns que les autres: salades, soupes, bœufs aux carottes, ravioli de viande ou végétariens, plats de légumes, salade de fruit. Il y en avait pour tous les goûts! La plupart sont ensuite retournés travailler mais une jeune fille avec son petit dictionnaire chinois-anglais nous a accompagnés au supermarché puis le réparateur vélo et le président de l'association nous ont guidés en voiture jusqu'à la sortie de la ville. Quel travail d'équipe! Franchement ils sont épatants de gentillesse. Nous ne sommes pas allés très loin car l'heure était déjà bien avancée mais mon destrier ne faisait plus un bruit de ferraille abominable. Au final j'ai dû changer mes plateaux et ma cassette mais sur trois plateaux il y en a que deux qui fonctionnent.

 

Le 31 août, nous avons enfin quitté la grande route et les bourrasques de vent pour s'enfoncer dans les champs de maïs, de tournesol et de haricots. Nous croisons maintenant beaucoup de villages et, avec les cultures, ce n'est pas forcément facile de trouver un endroit pour camper. Je n'ai jamais vu de maïs aussi hauts, ni de tournesols si gigantesques. Leurs fleurs sont énormes et trônent à plusieurs mètres au-dessus du sol. Ils sont plantés si serrés qu'il est impossible de marcher dans les champs. Il y a toujours plus de moustiques et ça devient insupportable dès que la nuit tombe. Je me tartine le visage et les mains d'anti-moustique, enfile mon pantalon de pluie et ma windstopper et mets ma capuche. Ce sont les seuls vêtements que ces bestioles n'arrivent pas à transpercer. La petite route cabossée est devenue tout à coup une belle route asphaltée bordée d'arbres en changeant de région. Il y a beaucoup d'éoliennes ici et bizarrement elle ne font aucun bruit. Ça y est nous avons quitté la Mongolie Intérieure!

 

A Tongyu, nous avons trouvé un hôtel pas cher et notre hôtesse nous a amené aux bains. Des douches entourent des tables de massage et il y a une salle de vapeur chaude. Mais il manque l'eau froide. Impossible de faire son mélange car tout est préréglé. Comme dans un hammam, on peut y rester autant de temps que l'on veut, ce n'est pas comme les douches publiques chronométrées de Mongolie. J'ai aussi pu faire réparer mon ordinateur en moins de 3 heures. Changement de carte mère, quelques points de colle, fabrication d'une nouvelle alimentation avec un produit concurrent, tous ces bidouillages vont prolonger la durée de vie de ma machine. Mais LA grande découverte à Tongyu fut finalement la sauce à la cacahuète pour accompagner les nouilles chinoises. La pâte de cacahuètes c'est bon, énergétique et ça ne prend pas trop de place. Un peu délayée avec du lait c'est savoureux. Il faut juste avoir un peu de patience lors du mélange car ça colle!

 

Puis pendant plusieurs jours nous suivons la même route, la S301, qui doit nous amener jusqu'à Shangzi. Elle n'est pas très large et assez passante à certains endroits. C'est usant de s'entendre toujours klaxonner pour un rien. Ici, le klaxon sert à dire à celui de devant « J'arrive et je vais plus vite que toi alors dégage! ». Du coup les camions arrivent à fond la caisse en klaxonnant en permanence et ne ralentissent pas d'un poil.

 

Nous sommes devenus des habitués des champs de maïs car il n'y a pas de place pour mettre la tente ailleurs. Le soir on se faufile dans un chemin de terre entre deux champs et on cale la tente dès qu'il y a un peu de place. C'est étrange toutes ces plantations car je n'ai pas encore mangé de maïs depuis que je suis arrivée en Chine et, à part quelques épis grillés, je n'en vois jamais dans les commerces.

 

Vincent a trouvé du matériel de rechange à Songyan, une chaîne et une cassette, démontés d'un autre vélo encore une fois. Songyan est une des nombreuses villes chinoises que nous traversons. A chaque fois je suis frappée par le changement énorme qui s'est opéré en une génération. Les jeunes hommes surtout. Ils paraissent tous lookés à mort, ont des coupes de cheveux sculptées, sont très minces et efféminés par rapport à la génération précédente. J'ai été demander mon chemin dans un magasin de coiffure et j'avais l'impression que tous les hommes sortaient d'un manga avec leurs chevelures épaisses et soigneusement mises en pli qui flottaient dans l'air.

 

Un bruit d'enfer partout, ils vivent dans le bruit. Même s'ils ont des véhicules électriques. Ça klaxonne malgré les nombreux panneaux d'interdiction en ville. Des vendeurs avec des hauts-parleurs déambulent. Tout ça fait un vacarme énorme. Je ne suis pas mécontente de retrouver un peu le calme de la campagne surtout que le maïs a cédé la place au riz. La taille de la route aussi a changé, elle est étroite et toute défoncée. Il n'y a la place que pour une voiture. Le problème c'est les camions qui bien sûr klaxonnent sans ralentir. Nous traversons des villages perdus dans la forêt ou les rizières. C'est affreux tous ces moustiques mais c'est si beau le soir au couchant quand une brume duveteuse s'élève au-dessus des rizières.

 

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F
<br /> Encore merci Virginie! Bien que revenue depuis maintenant plusieurs mois, c'est un plaisir de continuer à te lire comme si tu y étais!<br /> <br /> <br /> Premier récit de voyage ou les chinois ne sont pas classés dans la catégorie rustres, individualistes, peu ouverts ... Bernard Ollivier ne les avait pas vu de cet oeil, Sylvain Tesson semble se<br /> retenir de dire ce qu'il en pense, Virginie Caro serait-elle définitivement de la caste des humanistes optimiste ? Comme si celà restait encore à prouver! :-) Encore Bravo!<br /> <br /> <br /> François<br />
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L
<br /> Bonjour Virginie,<br /> <br /> <br /> Nous avons été très contents d'avoir la suite de ton voyage et de constater que tu as décidé de te remettre à l'écriture pour nous faire partager tes émotions.<br /> <br /> <br /> Peut-être que le livre viendra<br /> <br /> <br /> Depuis ton retour, tu as dû passer à autre chose notamment un nouvel emploi ou peut-être te prépares-tu à d'autres exploits?<br /> <br /> <br /> En tout cas c'est avec un très grand plaisir que nous t'accueillerons .<br /> <br /> <br /> Nous t'embrassons<br /> <br /> <br /> Alain &Colette<br />
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